Carrelage et révolution industrielle

Machines et séchoirs pour usine de céramique, tuilerie, briqueterie
Machines et séchoirs pour usine de céramique, tuilerie, briqueterie | © BnF

Au 19e siècle, la Révolution industrielle profite aussi à la céramique. La fabrication manuelle des carreaux est largement remplacée par une fabrication industrielle. De lourdes machines de fonte actionnées mécaniquement remplacent les moulins à vent ou à eau pour la préparation des argiles et des kaolins. La fabrication manuelle des carreaux est largement remplacée par une fabrication en grande quantité, rationnelle et mécanique. Le développement des moyens de communications permettant une large commercialisation des produits.
La préoccupation hygiéniste, qui s’impose aussi à cette époque, assure également le succès du carrelage. Dans les grandes métropoles de la fin du 19e et du début du 20e siècle, le carrelage envahit la rue et la maison. Les murs et les façades, les sols et les plafonds sont recouverts de carreaux de céramique, de grès ou de ciment. On assiste à l’essor d’entreprises spécialisées, comme les fabriques de carreaux de Desvres, de Gien ou de Sarreguemines, la faïencerie Boulenger, ou les établissements Henri Baudoux qui proposent les pièces les plus simples comme les plus sophistiquées.
La multiplication des catalogues de vente, présentant des modèles variés, témoigne de cet engouement pour le carrelage. Les industriels s’intéressent aux arts décoratifs et proposent des modèles en accord avec les goûts de l’époque.
Ainsi, les motifs végétaux et les lignes courbes de l’Art Nouveau, qui se développe à partir du début des années 1890, se retrouvent sur les carreaux qui habillent désormais les murs des habitations.

Plusieurs architectes s’approprient aussi le célèbre “carreau métro”, comme le Belge Victor Horta qui l’utilise pour paver les murs de sa salle à manger à Bruxelles, ou Henri Sauvage qui fait de la céramique un emblème de l’architecture moderne en pavant intégralement les façades de son immeuble à gradins rue Vavin dans le 6e arrondissement de Paris.

Les carreaux industriels au 19e siècle
Les carreaux industriels au 19e siècle |

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Des carreaux Art Nouveau
Des carreaux Art Nouveau | © BnF
Réalisation de carreaux : technique du cloisonné
Réalisation de carreaux : technique du cloisonné |

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L’invention du carreau ciment

De nouveaux matériaux apparaissent au 19e siècle. Avec le ciment, la cuisson devient inutile. Cette technique est inventée en France vers 1850 et se répand rapidement dans toute l’Europe. Produits en série, les carreaux ciment sont présentés sur catalogue, et surtout à l’occasion des expositions universelles, ces événements internationaux qui présentent les produits de l’industrie.
Ces carreaux de ciment colorés peuvent présenter des motifs. Ils sont alors fabriqués suivant la technique du cloisonné. L’artisan prépare des pâtes de couleurs différentes qu’il versera dans les compartiments d’un moule. Une couche finale de ciment gris sert de support à l’ensemble, qui est ensuite comprimé par une presse hydraulique.

Giandomenico Facchina et la mosaïque en série

Né en 1826 dans la région du Frioul (nord de l’Italie), Giandomenico Facchina remet au goût du jour l’art de la mosaïque dans le monde entier. Très jeune, il travaille en tant qu’apprenti sur des chantiers de restauration à l’occasion desquels il apprend l’art de la mosaïque.

Au cours de ces expériences, Facchina envisage la technique révolutionnaire de la pose indirecte ou par inversion, qui simplifie considérablement le travail et en diminue le coût et les délais. La mosaïque est entièrement assemblée en atelier, à l’envers sur des feuilles de papier kraft. Les panneaux “prêts à poser” sont par la suite transportés sur le chantier pour être posés sur une chape de ciment. Cette méthode, qui garantit un rendu d’une grande régularité, permet aussi de créer dans des délais raccourcis des compositions où les motifs se déclinent en série, pour un coût très bas. Persuadé que son invention, inspirée des méthodes de restauration de la mosaïque antique, va rencontrer un grand succès, Facchina ”monte” à Paris se présenter auprès de plusieurs architectes. En 1869, c’est Charles Garnier, architecte de l’opéra de Paris, qui lui offre la gloire en lui proposant de participer de chantier de l’Opéra de Paris en réalisant les 300 m2 de mosaïques de l’espace central dans lequel se trouve le grand escalier. Facchina obtient par la suite de nombreuses commandes de la part de particuliers, de grands magasins et d’hôtels de luxe pour qui il livre les plaques prêtes à poser en France comme dans le monde entier.