Les latrines

L’attaque du château fort
L’attaque du château fort |

© BnF

À la campagne, les toilettes privées ne sont pas jugées indispensables : les résidents vont se soulager dehors ou à l’étable, où sont fréquemment installés des sièges de toilettes. Mais au château ou en ville, elles constituent très tôt un élément de confort essentiel et témoignent d’un sens du confort certain.

Le plan des châteaux permet de repérer aisément l’endroit réservé aux latrines : elles sont en général installées dans une tour ou dans une tourelle en surplomb d’un fossé, le plus loin possible de la façade principale. Ces latrines en encorbellement, dont l’installation est peu coûteuse, n’ont pas besoin de conduits ni de fosses : les matières fécales tombent directement dans un fossé ou dans un espace isolé, au pied de la muraille, où les jardiniers peuvent les récupérer pour le compost.

Les toilettes disposent d’une porte ; elles sont aérées par un "éventouer", simple petite ouverture démunie de verre à vitre. Elles sont construites de préférence au dos d’une cheminée, afin d’être chauffées par la paroi mitoyenne. Le trône est maçonné quand il est construit dans le bâtiment même, ou en plâtre, plus léger, dans le cas des encorbellements. Le siège, dépourvu de couvercle, est en bois. Dans les hôtels aristocratiques, il est recouvert de velours. Dans les espaces publics, on trouve des toilettes collectives sous forme de bancs de bois percés à plusieurs places.

Les latrines au Moyen Âge
Les latrines au Moyen Âge | © Bibliothèque nationale de France
Latrines en surplomb d’une ruelle sanitaire dans laquelle l’utilisateur est tombé
Latrines en surplomb d’une ruelle sanitaire dans laquelle l’utilisateur est tombé |

© BnF

Chasse d’eau ou conduit d’évacuation

Dans les grands monastères, des lâchers d’eau lavent à intervalles réguliers la canalisation en sous-sol des toilettes communautaires. Mais le plus souvent, les latrines sont dépourvues de chasse d’eau. Dans les demeures aisées, les sièges donnent sur un conduit en terre cuite, ou en moellons liés au mortier de chaux. Il est intégré aux murs, et sa pente verticale et sa largeur (jusqu’à 75 cm de diamètre) doivent suffire à l’évacuation des produits faisant fonction de papier hygiénique : feuilles de plantes appréciées pour leur dimension et leur velouté (le bouillon-blanc), paille, coton chez les aristocrates, papier usagé à partir du 16e siècle…
De telles latrines représentent un investissement important, ce qui en fait un élément de confort et de luxe réservé aux élites.

"Les maîtres fifi", un corps de métier spécifique

Rares sont les latrines branchées sur un égout. Les conduits donnent sur une fosse maçonnée aménagée en sous-sol. Le sol peut être légèrement incliné afin d’assurer l’homogénéité du remplissage. La dimension de la fosse dépend du nombre d’habitants : dans un château princier, où résident de nombreux invités et serviteurs, son volume est celui d’une grande cave. Ces fosses, dotées d’une trappe obturée d’une dalle de pierre, ouvrent sur un fossé, une rue, une cour, d’où l’on peut les curer une fois par an. Un corps de métier est spécialisé dans cette tâche : les “maîtres fifi”.